Momon Maguy Chayne Sporting-Club Salonais Rugby Salon

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Momon et Maguy    Si loin, si proches

   Mes souvenirs de petite fille sont remplis de copeaux de bois très blonds, très beaux, qui ressemblaient aux belles anglaises des demoiselles riches de Lambesc.

La forge aussi m’impressionnait beaucoup : Papa tirait sur une chaine reliée à un énorme soufflet au plafond, et un foyer se formait à la hauteur de mon nez, rouge, brûlant. Papa en sortait des barres de fer écarlates qu’il travaillait au marteau sur une enclume. Pour moi, c’était magique : le fer s’aplatissait, s’allongeait, se tordait au gré du marteau de papa ou de grand-père, au milieu de millions d’étincelles qui ont été mes premiers et mes plus beaux feux d’artifice.

Marcel et Auguste Turc
à la forge

   Puis le bois, sous les mains de papa devenait rayons de roue, brancards, plateau, ridelles, tiroir, car tout y était quand ils livraient une charrette, toujours peinte en bleu, bien sûr ! Pour moi, c’était un miracle à chaque fois nouveau, un tas de planches, un tas de ferraille, et puis, une superbe charrette ! Mais il y avait tout de même un moment de grande peur, où il fallait que je me tienne sur les escaliers de grand-mère Julie, c’était celui du cerclage des roues. Là, grand-mère participait souvent, presque toujours, je crois bien. Les roues en bois étaient finies, rayons, moyeu, le cerclage commençait par un grand foyer au charbon de bois de l’autre côté de la route (la nationale 7) : En 1926 ou 1927, les voitures ne gênaient personne.

   Quand le foyer était très fort, avec deux grandes pinces chacun, pépé et mémé prenaient le grand cercle en fer, très grand et très lourd, traversaient la route, et le posaient doucement dans le foyer qui était exactement de sa grandeur, afin de le porter au rouge. Pendant ce temps, dans un énorme cuvier devant l’atelier, papa préparait l’eau et les seaux. Quand le cercle était rouge, pépé et mémé le ramenaient et sans un geste de trop, le posait doucement sur la roue en bois, bien fichée sur son axe au milieu de la cour, et les seaux d’eau faisaient le reste. Le bois commençait à brûler, mais l’eau froide que tous mettaient en abondance tout autour de la roue resserrait le fer qui s’était dilaté sur le foyer. Cela durait longtemps, je ne voyais presque plus  papa, ni mes grands-parents, noyés dans une fumée si grande si épaisse pour moi qui était si petite. J’ai toujours au fond de moi cette odeur de bois brulé, ce travail de titan qu’ils faisaient tous les trois. Ils recommençaient pour la deuxième roue, la charrette attendait dans l’atelier, posée sur de gros tréteaux juste à la bonne hauteur pour placer les roues. Cela fait, papa et pépé, en même temps, les enlevaient avec de grosses masses en bois : je les entends encore « Attention, Marcel, à trois, c’est bon ! » Et voilà la charrette sur ses deux roues, fière et belle.