Momon Maguy Chayne Sporting-Club Salonais Rugby Salon

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Momon et Maguy    Si loin, si proches

1900-2000    (fin)

          Oui, à Lambesc, la vie s’écoulait, calme et tranquille, enfin calme, c’est beaucoup dire, car si papa était très amoureux de maman, c’était un fantaisiste, des mains en or, des idées plein la tête. Mais il ne supportait pas que maman couse encore quand il arrivait le soir ou même à midi. C’était une génération d’hommes (et tous pareil d’ailleurs) où on passait d’abord au « Bar de la Paix » boire le pastis avec les copains et refaire le monde, puis, on rentrait à la maison où souvent quelque chose n’allait pas ! C’était sa mère, ses sœurs, mais jamais son père, mon petit pépé charron, enfin, bref, il y avait toujours quelque chose qui l’embronchait.

 Mais aussi, que de rires, de chansons, que la vie était belle : pas de télé, un poste de radio où passaient tous les chanteurs de l’époque. L’après-midi, en cousant, on écoutait des pièces classiques, Musset, Racine, c’est là que j’ai pris cette passion de la musique, des beaux textes et des opéras : je les savais tous par cœur, mais en français, Carmen Tosca, Mireille, le Barbier de Séville, la Bohème «  Que cette main est froide, laissez-moi la réchauffer », Werther « Pourquoi me réveiller au souffle du printemps ». Et puis papa chantait sur scène, il restait souvent en panne au milieu de la chanson « Léa, souffle-moi…. » J’avais, moi qui chantait si bien, une peur bleue quand papa était sur scène, avec sa perruque rouge et son costume aux manches et au pantalon trop courts ! Il avait un succès fou quand il attaquait :

Il y a des hommes qui cranent quand ils disent

Qu’ils sont beaux,  qu’ils sont costauds

Moi j’ai pas l’allure d’Hercule,

Ni d’un boxeur, ni d’un lutteur,

Mais quand j’me promène sur les boulevards

J’attire les regards...



Et puis,  là-dessus, il reprenait "j’aime le son du cor, le soir au fonds des bois » il avait une voix de baryton-basse magnifique !  J’aime de tout cœur maman, mais j’ai autant aimé papa, notre vie ensemble a été courte, de 25 à 44, le temps a passé bien trop vite et ma vie de fillette et de jeune fille s’est arrêtée là. J’aurais bien des choses encore à vous dire, ça viendra, mais ce que vous, les filles, ne comprenez pas, ou mal, c’est que ma vie a basculé d’un coup dans un gouffre épouvantable et imprévu dont je ne suis jamais sortie.



 



  

          Seul papa Momon, homme bon, simple et intelligent, m’a laissé vivre avec mes souvenirs, il m’a donné ce que je voulais par-dessus tout, des enfants, il m’a laissé vivre comme je voulais, libre d’esprit. D’ailleurs, j’ai toujours fait ce que j’ai voulu, sans un rond, mais ma couture m’a souvent sortie d’affaire, avec mes quatre  filles qui ont comblé ce vide que 44 avait creusé. Toutes les misères physiques que j’ai pu avoir, et je n’ai pas été épargnée, n’ont rien été à côté de ça.


          J’avais mes filles, des rires, des larmes, des disputes, des baptêmes, des fiançailles, des mariages, des voyages, Paris, Orthez, Marseille, Lyon où est mort Jean Moulin (on y revient toujours)  et maintenant les petits-enfants, neuf qui maintenant sont treize avec leur mari et femme,  deux arrière-petits-enfants,  bientôt trois!


          Oui, tout ça m’a aidée à vivre, malgré la joie et le bonheur perdu au Fenouillet et tous ceux qui dorment à Lambesc.